Les personnalités perverses narcissiques

Que signifie le mot pervers ? 

Il est issu du verbe « pervertir », qui signifie littéralement « détourner », d’après l’étymologie latine pervertere : « mettre sens dessus-dessous » et globalement « action de détourner quelque chose de sa vraie nature ».

Que détourne un pervers ? Il détourne la vérité, et se situe non en dessous, mais au dessus, ou au-delà de la Loi. Ainsi, le pervers connaît la Loi, mais il s’arrange pour passer au travers : il ne la considère pas, tant qu’il peut s’en passer, il s’en passe.

En revanche, s’il en a besoin pour contrer les autres, il l’utilisera, souvent seulement en l’invoquant.

Comment devient-on pervers ?

La question est importante, parce qu’elle permet de comprendre ce qui se passe en termes de psychopathologie pour ces personnes, qu’elles soient homme ou femme.

La personne, au moment où elle était enfant, a subi un choc traumatique insurmontable, qui l’a conduite à créer une psyché formée un peu comme une « coquille vide » pour utiliser cette métaphore, avec une faille narcissique importante, une sorte de vide. Cette construction lui a servi à survivre psychiquement, et les apprentissages ultérieurs en seront affectés.

Par la suite, pour se construire, cet enfant particulier, pour se faire accepter, apprend à correspondre au désir des autres, tout en satisfaisant son propre besoin.

Par exemple, il/elle se construit en apprenant, petit-à-petit à manipuler les autres, utilisant tous les subterfuges et stratagèmes pour arriver à ses fins. Il/elle peut ainsi se permettre de MENTIR de façon soutenue et régulièrement, et cela sans aucune culpabilité .

Et il devient ainsi le centre de l’attention des personnes de sa famille, un peu comme un petit roi. Son narcissisme devient alors une sorte d’hypernarcissisme, et c’est pour cela que l’on parle de « pervers narcissique ».

Les personnes atteintes de pathologie perverse narcissique sont ainsi de redoutables manipulateurs ou manipulatrices (hommes ou femmes confondus), qui, pour obtenir quelque chose, arrivent à convaincre par de subtiles manœuvres, des personnes parfaitement intelligentes de tout mettre en œuvre afin de les aider (comme on l’a vu avec l’affaire Cahuzac en avril 2013).

Les caractéristiques principales de la personnalité perverse sont :

  • la manipulation,
  • l’égocentrisme,
  • l’intimidation,
  • les mensonges avec aplomb,
  • et l’absence d’empathie.
pervers narcissique
Le pervers narcissique

Pourquoi a t-elle / a t-il décidé de m’attaquer ?

  • Parce que rapidement il/elle a vu chez vous quelqu’un qui ne rentrait pas dans ses ordres aberrants et dénués de réels fondements rationnels.
  • Parce que vous êtes peut-être quelqu’un de dangereux pour elle, dans la mesure où vous avez une notion aigüe de la justice, ou des droits des personnes.
  • Parce que vous lui avez signifié des comportements irrespectueux des autres et de vous-même
    • par exemple le fait qu’il/elle n’écoutait pas lorsqu’on lui parlait, et qu’elle coupait la parole.

La victoire des apparences

Prenons l’exemple d’une femme PN : tout n’est chez cette femme que du « faire-semblant« , (tout comme certains ont pu le constater chez Cahuzac).

  • La personne perverse narcissique fait semblant de travailler (par exemple, elle est absente la plupart du temps, mais s’arrange pour que cela ne pose pas problème)
  • Lorsque quelque chose est réellement fait, c’est parce que ce sont les autres qui s’en sont mêlés, mais elle-même ne fait que des petites choses de façon légère. Elle use subtilement du verbe, de façon à ce que toute tâche un peu lourde soit systématiquement déléguée aux autres.
  • elle fait semblant d’être enthousiaste, sympathique, crée un « spectacle », s’attire l’admiration des autres.
  • Dans ses échanges avec les autres, elle enjolive systématiquement certains détails (en fait inutiles, mais cela sert à créer un effet positif), tout en cachant et en floutant les faits réels, et en déformant les faits réels.
  • Par ailleurs, elle utilise des pronoms personnels différents en fonction des circonstances : le « nous » est très souvent utilisé, alors qu’il n’y a pas réellement d’équipe.

Les complices ou alliés

Elle a bien sûr des complices, mais il/elle les manipule aussi, en leur faisant croire qu’ils sont importants, qu’ils sont intelligents. Il/Elle sait très bien détecter les personnes généreuses, qui ne se méfient pas en étant sympa avec tout le monde, et qui sont également peu capables d’analyser psychologiquement les autres.

Dans le cadre du harcèlement moral, si personne ne se met en travers de son chemin, c’est parce qu’il ou elle a su manipuler un certain nombre de personnes et s’en faire des complices, en vue de discréditer la personne visée, ou de lui nuire d’une façon ou d’une autre.

Rédaction : Tanguy Bodin-Hullin, 16 avril 2013, révision décembre 2016

Se protéger de l’emprise d’une personne manipulatrice

Comment se protéger de l’emprise d’une personne manipulatrice ?

Si vous avez l’impression que vous êtes pris dans un système d’emprise, ou de manipulation,

il est opportun de commencer par vous renseigner. La personne à qui vous avez affaire peut-être ce que l’on appelle un pervers narcissique.

Comment le savoir ? Les trente critères !

En commençant tout simplement par regarder la liste des trente critères définissant le pervers narcissique, selon Isabelle Nagare-Aga, et voir si vous retrouvez bon nombre de ces critères chez le personnage.

S’il vous semble ainsi que les caractéristiques du personnage correspondent aux critères de ce qui définit la perversion narcissique,

Première question : dans quelle situation êtes-vous ?

il est utile de considérer une première question, qui est celle de la situation dans laquelle vous êtes placé(e) par rapport à l’autre, et votre niveau d’implication :

  1. Situation de couple / amoureuse ?
  2. Situation professionnelle (travail ou études) ?
  3. Situation familiale ?
  4. Situation amicale avec un rapport lié à l’argent ou à une dette ?
  5. Situation de rivalité ?

Selon la situation, vous aurez bien entendu plus ou moins de liberté d’action, mais dans tous les cas il s’agit de quelque chose qui va fortement vous affecter.

Comment se protéger ?

Le conseil général qu’on peut donner est le suivant :

Fuir

Si vous êtes dans une situation qui vous le permet, tentez de fuir le personnage en évitant autant que possible le conflit. En revanche, si vous êtes dans une situation bloquante (couple, famille, travail que vous ne souhaitez pas perdre), il va probablement falloir trouver d’autres stratégies. Il y a en effet des situations dans lesquelles on ne peut se détacher rapidement, par exemple lorsqu’on est amoureux de l’autre, ou lorsque l’autre est notre supérieur hiérarchique, ou lorsque la personne est l’un de nos parents..

Se détacher

Pourtant, une chose importante est de se dire que plus vous serez « détaché », psychologiquement et physiquement, plus vous aurez de facilité à vous défaire de ce genre de personnage pour pouvoir retrouver une vie apaisée. Il est donc plus que conseillé de garder votre sang froid en sa présence. Si vous vous énervez, (souvent à postériori, car sur le moment, lors des manipulations, on est tellement surpris que cela nous immobilise et nous pétrifie, nous rendant ainsi complètement passif et dérouté), ne laissez pas cette colère vous prendre sur le moment d’une part, (quoique dans certains cas, cela puisse être salvateur, mais il s’agit ici d’un cas particulier et nous en reparlerons), et conservez autant que possible un « self-control ». La colère risque de vous mener à des actes effectués rapidement, alors qu’au contraire, il est nécessaire de bien réfléchir…

Un risque : tenter de jouer avec la loi en agissant comme le pervers

Lorsque vous perdez votre sang-froid, d’une part le pervers (narcissique) sait qu’il a mis le doigt là où ça faisait mal, d’autre part il voit que vous perdez vos moyens, et surtout, c’est le pire, il peut réutiliser vos propos et votre réaction pour retourner les choses à son avantage vis-à-vis d’un ou de plusieurs tiers. Or, il faut se dire qu’il excelle dans cet art. Certains se diront : « oh, mais je vais être plus pervers que lui, je vais jouer avec son jeu »… quel orgueil ! vous risquez de tomber plus bas que là où vous étiez précédemment. Et puis, vous allez rentrer dans un « jeu pervers », c’est le cas de le dire, vous allez vous prendre la tête pour essayer de l’avoir, et vous risquez de vous apporter encore plus d’emmerdes que ce que vous aviez déjà. Enfin, cas ultime, vous risquez de faire des choses contraires à la loi, essayant de jouer le rôle de votre propre justicier. Se faire justice à soi-même, être Zorro, ce n’est pas gagné.. la stratégie est souvent perdante, et vous risquez finalement de devenir un vrai coupable si les choses se retournent contre vous !!

La loi et son rôle pour le pervers narcissique

En parlant de ces stratégies de défense, nous ne sommes pas loin ici d’un détail important : la seule chose que le pervers peut, dans certains cas, craindre, c’est ce qui représente la Loi, au sens large du terme. En d’autres termes, le juge, ou celui qui a le pouvoir et qui peut donc réduire sa position. En fait, il est parfois dit que le pervers narcissique ne connaît pas la loi, mais qu’il joue avec. Cela peut être entendu de deux façons : jouer avec la loi, qu’il contourne parfaitement. Ou encore, jouer avec les personnes qui représentent la loi.. ainsi, il est possible pour un bon pervers narcissique de manipuler un juge ou un supérieur hiérarchique. Jouer de la séduction au sens large, amadouer avec des mots est une de ses grandes caractéristiques, et se faire passer pour une victime, est une stratégie qu’il maîtrise tout-à-fait.
Seul un bon usage de la loi, avec un bon dossier, longuement préparé, et un avocat au fait de ce genre de choses, peut parfois avoir raison du pervers narcissique, mais ce sera toujours avec beaucoup d’énergie perdue du côté des victimes, avec parfois des années de procédure juridique, etc. Ce terrain reste donc extrêmement glissant… d’où la remarque du début : partez, si vous le pouvez, au dès que vous le pourrez en tous cas.

La stratégie de défense du pervers narcissique : se faire passer pour une victime. Et la vôtre : faire un dossier.

Usant de cette stratégie de défense redoutable, le pervers narcissique sait se faire passer pour une victime, sait utiliser les autres pour les transformer en alliés inconscients. Il use aussi comme son nom l’indique, de perversion et de perversité, et il sera capable de « retourner » littéralement les arguments en apparence les plus convaincants que vous exposerez à vos supérieurs, par exemple. Il est donc opportun, comme beaucoup le conseillent, dans un premier temps, de noter ce qui se passe au fur et à mesure, dans un lieu sûr, et surtout régulièrement, comme la fourmi qui amasse attendant l’hiver dans la fameuse fable de la Cigale et la Fourmi de ce cher Jean de La Fontaine. Et lorsque l’hiver viendra, peut-être ressortirez-vous ce dossier pour l’utiliser pour de bon. Je dis bien : « peut-être ». Car si vous avez l’occasion de fuir après quelque temps, c’est peut-être une tout aussi bonne et judicieuse stratégie… et qui ne vous aura fait perdre qu’un peu d’énergie à écrire et formuler vos idées, sans toutefois vous ruiner la vie.

Concernant ce dossier, ne donnez pas vos élements en cours de route, pris par la haine ou la rage de vous être fait avoir.. vous pouvez parfois penser qu’il faut que tout éclate, mais même si vous avez une envie folle de voir la Vérité éclater et reprendre ses droits. Gardez votre énergie, et sachez lâcher quelque chose d’amassé, pour avoir mieux, en d’autres termes abandonnez votre haine et votre envie de revanche pour retrouver la paix. Avec le temps et la distance, il sera, je vous le souhaite possible de transformer cette situation de cauchemar en mauvais souvenir. Le détachement va aussi vous permettre de prendre une certaine distance, une certaine neutralité, tout en évitant une peur paralysante.

Geneviève Reichert-Pagnart dit ainsi, dans une interview du Nouvel Observateur, et concernant la perversion dans le couple :

« Face à ce genre d’individus, en attendant la séparation, il faut impérativement constituer son dossier de procédure. La victime devra alors éviter toute discussion houleuse. Qu’elle ne laisse pas prise aux critiques, qu’elle se montre neutre. Mais cette attitude de composition ne peut durer qu’un temps assez court et ne préserve pas nécessairement du risque d’un éclat de violence. »

Méfiance, disparition, attente, réapparition…

Mais reprenons sur le temps présent, l’actuel .. Vous commencez à vous méfier de lui ou d’elle, et tout commence à vous « prendre la tête », comme on dit. Que faire ? Il ne s’agit pas, bien entendu, de tomber dans une forme de paranoïa, qui serait de se mettre à se méfier de tout, tout le temps. Mais il s’agit de prudence bienvenue et à propos. Bien sûr, n’oubliez pas que lorsque rien ne se passe de votre côté, cela n’est que répit provisoire. Le pervers sait se faire silence, et réapparaître au moment propice dans votre vie. Par exemple, dans les relations amoureuses : admettons que vous ayez réussi à vous en défaire, ou plutôt qu’il soit parti de lui-même..(quel étonnement d’ailleurs !) .. Ne rêvez pas trop : il reviendra un jour s’annoncer, un petit texto apparemment bienveillant, un petit mail qui vous fait penser : « il pense encore à moi, il a besoin de moi » et hop ! le contact est renoué, et vous vous remettez vous-même dans son joli filet, sa jolie toile, dont une fois touchée, vous aurez encore un mal fou à vous défaire. Idem dans le travail. Tôt ou tard, un nouvel évènement vous donnera l’occasion de constater que sa présence est non seulement toujours aussi délétère vous concernant, mais aussi et surtout qu’il reste le maître des lieux. Il se peut même qu’un nouveau coup à sa façon vous montre qu’il avait tout calculé.. Eh oui, s’il veut vous faire sortir de l’échiquier, il se peut fort bien qu’il y arrive.

Ce jour-là, votre colère ressortira, mais il faudra à nouveau faire preuve de ce fameux sang-froid. A nouveau : ne pas péter les plombs en rentrant à votre tour dans des agissements tordus, en parler autour de soi le plus possible, ne pas s’isoler, être même un peu hystérique auprès de vos collègues parfois peut vous protéger, car ils vont se rendre compte que ce qui se passe a beaucoup d’impact. N’oubliez pas non plus votre sens de l’humour, même si vous avez l’impression qu’avec tout ça vous n’avez plus la tête à rire… du tout.

Il existe plusieurs sortes de pervers narcissiques : ceux qui sont plus du côté « pervers », et ceux qui sont plus du côté « narcissique », et puis d’autres personnalités plus proches des caractériels un peu paranoïaques. Paul-Claude Racamier, dans son livre « Le génie des Origines », (chapitres IX et X) parle des perversions narcissiques au pluriel. Il décrit ainsi deux postures que l’on retrouve chez les personnalités perverses narcissiques : l’une qu’il appelle « l’avantageux », et l’autre qu’il appelle « la phalloïde ».

« L’avantageux : au grand jour, au très grand jour, tout en montre et en exhibition, tout en plumes et en parades ; bref, au premier rang ».

« La phalloïde :  toute en cachette et en coulisse, jamais au grand jour et de plain-pied, toute à manoeuvrer des agents pris pour instruments, qui agiront à sa place et parfois paieront pour elle ; bref, toute en sous-main. »

J’aimerais dire ici qu’il me semble que de ces deux postures, l’une est plus du côté du narcissisme, et l’autre plus du côté de la perversion. Le personnage de « L’avantageux » montre sa grandeur : il est du côté narcissique, il se croit le plus intelligent, et en vient à ignorer les autres, tellement il se croit supérieur.

Le personnage de « La phalloïde », comme le dit Racamier, assouvira ses haines, mais laissera sa note à payer par ses proches. On pourrait donc dire que des deux, c’est cette tendance, cette posture qui est la plus dangereuse.

Le livre « Le harcèlement moral » écrit par Marie-José Gava (Editions Prat, 2012, environ 20€) décrit ces deux types de personnalités : narcissique, et perverse.

[Article écrit par Tanguy Bodin-Hullin, psychologue clinicien – Site http://www.psychologue19.fr (dernière mise à jour : 2 mars 2013) ]

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Références des ouvrages citées dans cet article :

  • Paul-Claude Racamier, Les perversions narcissiques
  • « Le harcèlement moral » écrit par Marie-José Gava (Editions Prat, 2012, environ 20€)

Vous trouverez de nombreuses autres références d’ouvrages et films sur la perversion narcissique sur la page Références